Annus horribilis 3 : d’un KO debout à un autre…

Puisque de toutes les vasières ne peuvent effluer que les memes relents des memes boues et que les cercles sont ce qu’ils sont…Autant reprendre ce qui a déja été écrit…

Ne plus écrire…C’est tomber et céder, c’est accepter et ressembler à ce portrait de moi meme qu’un certain monde me propose, ne plus écrire c’est ça finalement, c’est se coucher et revenir à l’ordre, à leur ordre, à cet ordre qui veut m’interdire de voir la poésie d’un chemin forestier dans le jardin et qui veut m’ordonner de préférer une gentille pelouse taillée au cordeau, une pelouse bien verte, bien sage, bien arrosée, une pelouse entourée de joyeuses petites fleurs aux si jolies couleurs et surtout si bien rangées, si bien taillées dans leur ordonnancement quasi militaire, une si charmante pelouse au milieu de laquelle je ferai troner un barbecue pour les si merveilleux dimanches de printemps, cet ordre auquel j’ai échappé pendant trente ans, cet ordre qui me demande de m’adapter et de dire merci, qui m’enjoint d’avoir peur, de me contenter de faire fructifier du patrimoine, de renoncer à l’élan de la liberté, de la vie pour obéir, cet ordre qui ne me donne le choix qu’entre renoncer ou mourir…Là ne plus écrire c’est accepter, entériner cette sentence de mort sociale, ne plus écrire c’est rentrer dans le rang, mourir oui mais pas comme ça, pas pour ça, pas parce qu’on me l’ordonne, pas parce que la violence sociale veut faire de moi la bete facile de ses raisonnements simples et étriqués…!

Alors écrire…Ecrire pour se battre, pour ne rien céder, ce n’est pas facile quand on n’en est plus vraiment capable de retrouver un semblant de concentration, mais pourtant meme si je dois m’attacher à ma chaise il faut sortir de cette brume, il faut revenir, se tenir droit sous la nausée pour dire, la dire cette vérité que l’on veut faire rentrer à force dans des clichés, la vérité, ma vérité…Parce que ces heures, ces années le nez dans le guidon à ne rien voir d’autre que la maladie, le devoir, la responsabilité d’un engagement, ces heures passées à ne plus se voir, à s’oublier pour ne penser qu’à quelqu’un d’autre pour etre à la hauteur, cette putain de hauteur que vous vous imposez, cette réputation de force, de stabilité, de fiabilité dont la vie, les autres vous ont affublé et que vous ne voulez ni ne pouvez trahir…Oui ces heures, ces années, ces jours, ces nuits passés à etre là, toujours, à ne jamais céder meme face à un corps qui lache, oui ces années elles ont davantage tenu de la torture que de ces grandes vacances au bord de la mer pendant lesquelles quelqu’un se serait goinfré en profitant de tout que certains veulent voir…!

Des vacances au bord de la mer…De longues, de très longues vacances, treize ans de vacances au bord de la mer…Il y a des moments où j’aimerais voir le monde avec les yeux de certains, avoir leurs certitudes, me plonger avec le délice de la lacheté dans les facilités de leurs simplifications, de leurs schématisations, m’étonner avec eux que ce soit moi qui ai acheté l’électroménager, la chaudière, le chauffe eau, des meubles, des lampes, oublier que tout ça a été une vie, ma vie, un quart de siècle de vie, une action, une construction, une réussite, j’aimerais, vraiment, je pourrais me contenter de voir une maison que j’ai participé à développer pendant vingt trois ans comme un corps étranger et la voir vieillir, dépérir sans ressentir ce malaise, cette douleur au creux de mon estomac…Et meme poussant plus loin dans l’horreur petite et minable de leur raisonnement j’aimerais avoir ce cynisme utile qu’ils me pretent et pouvoir voir une mère sans affectivité aucune, la voir avec ces yeux, leurs yeux, leur cervelle, la voir comme un corps étranger, une vache à lait lambda et ne pas avoir envie de me tirer une balle à chaque fois que je pense à elle et à ce que ce système, ce qu’ils font d’elle, à quoi ils la réduisent, méprisant, insultant sa vie, ses choix, la laissant, la séquestrant, la manipulant comme l’objet qu’ils ont enfin entre leurs mains…!

J’aimerais, sincèrement j’aimerais, je ne ressentirais rien, ni ma tristesse, ni ma honte, ni ma douleur…Mais je ne le peux pas, j’ai mal, j’ai honte et j’ai peur, peur de vivre dans un monde qui ne sait raisonner que comme ça, j’ai honte d’avoir été bien élevé, d’avoir suivi, d’avoir nourri une société qui peut penser comme ça, dont le premier réflexe est de raisonner comme ça, j’ai envie de m’insurger, de me révolter contre ces cervelles qui naturellement intègrent ça, qui vivent dans un monde qui intègre ça en première valeur, à ceux là que leur vie doit etre terrible, petite, apeurée, dégueulasse, mais simple en meme temps, tellement simple…!

Allez vous étonner après qu’ils aient peur de tout et de rien ces braves gens, qu’on puisse faire avaler n’importe quoi à des cervelles pleines d’autant de saloperies…L’autre l’a dit, chez ces gens là monsieur…On compte…On triche…On prie…Et on n’écoute meme pas ce que ses pauvres mains racontent…Ils ne vivent que comme ça, ne voient que comme ça, ne pensent que comme ça, comment pourraient ils comprendre ce qu’a été cette vie, cette tentative, cette expérience…? Et pourtant ça a existé, deux personnes ont élevé un univers en commun, gratuitement, collectivement, sans meme vraiment de raison et encore moins de calcul, je suis désolé braves gens mais il est des etres humains qui ne comptent pas, qui ne trichent pas, qui ne prient pas forcément beaucoup non plus mais qui toujours écouterons ce que toutes les mains auront à dire…!

Bah…Allez, je sais bien que je ne vais pas faire une révolution à moi tout seul mais je vais continuer à écrire, à le dire ce qu’elles racontent ces mains, ces mains de rien, ces mains à la peau parcheminée, ces mains douloureuses qui tremblent et se tendent, ces mains qui ne comptent pas, qui ne calculent pas mais qui veulent se voir comme autre chose que des pattes ou des pinces, ces mains qui ne se tendent que pour etre serrées, ces mains qui prient, les mains de l’humanité…L’humanité putain de merde !

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